| Résumé |
Par quel mécanisme effrayant un homme peut-il être condamné pour un crime qu’il n’a pas commis ? Ce film est le récit d’un engrenage. Le 17 avril 1993, la principale d’un collège de Troyes, Denise Descaves, est sauvagement assassinée (poignardée au coupe-papier !) dans le bureau de sa secrétaire. Les enquêteurs suspectent le proviseur du collège : Pierre Dubois. Le voici placé en garde à vue, puis interrogé pendant plus de six heures. Les policiers prétendent qu’il n’a pas pu commettre ce crime seul et qu’il a été aidé par sa femme et sa fille. Lesquelles seront elles-mêmes placées en garde à vue et interrogées. Pierre Dubois, affaibli, fiévreux, craque. Il fait exactement ce qu’on lui demande : il endosse le rôle du meurtrier et invente son propre crime. Pour qu’on le laisse en paix, mais, surtout, pour qu’on cesse de vouloir y impliquer à tout prix sa femme et sa fille. "J’étais obnubilé, se souvient-il, par le désir de protéger ma famille de tout interrogatoire vexatoire et traumatisant. De guerre lasse, j’ai fini par signer ce qu’ils voulaient"... Dès le lendemain, Pierre Dubois se rend compte qu’il va dans le sens contraire de ce qu’il souhaite et revient sur ses soi-disant « aveux ». La police, puis le procureur, après lecture du PV, constatent en effet que rien n’y est cohérent. Il est aussitôt libéré. Le cauchemar semble terminé pour Pierre Dubois. Il ignore que sa malheureuse déclaration, inspirée par la panique, infléchira le cours de toute son existence… Car deux ans plus tard, il suffira de l’arrivée d’un nouveau commissaire principal au SRPJ de Reims pour que Pierre Dubois redevienne brusquement le suspect numéro un. Ses aveux ne collent pas aux faits ? Qu’importe ! Faisant fi des invraisemblances et délaissant les autres pistes, ce policier mettra tout en œuvre pour faire rentrer Dubois dans la peau du meurtrier. C’est bien ce qui est le plus inquiétant dans cette affaire : l’entêtement, l’acharnement des enquêteurs, puis du commissaire, à faire coûte que coûte tenir debout ce qu’ils nomment « l’hypothèse Dubois ». « Lorsqu’un commissaire et un juge d’instruction décident de cibler l’enquête sur un individu, note le réalisateur Thierry de Lestrade, aucun garde-fou ne peut garantir à cet individu l’équité de la procédure. Contrairement aux Etats-Unis, où les avocats ont le pouvoir de mener leur propre contre-enquête, en France, les défenseurs sont réduits au rôle de figurants ou de faire-valoir. Tout acte de procédure doit d’abord passer par le juge d’instruction... Le film de Thierry de Lestrade mène donc vaillamment cette contre-enquête (par l’intermédiaire d’un ancien commissaire divisionnaire à la retraite) et nous démontre avec force que Pierre Dubois n’a pas pu commettre ce crime. Apprendre que l’homme a été condamné à dix-huit ans de prison fait froid dans le dos ! On est surpris, choqué, que les jurés soient restés par trois fois si aveugles. Selon notre système judiciaire, le doute doit profiter à l’accusé : pourquoi Pierre Dubois n’en a-t-il pas bénéficié ? Un film fort et convaincant qui accomplit cette double et salutaire mission : rendre justice à un innocent - à l’évidence - toujours en prison, tout en pointant du doigt les dysfonctionnements de notre système pénal"...
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